CE SERAIT LES ABANDONNER QUE DE NOUS JOINDRE À VOUS, PARCE QUE NOUS SEULS, ET NON PAS VOUS, POUVONS LEUR ÊTRE UTILES

C’est le sort du peuple de Provence, qui n’était pas pris en charge de façon adéquate par le ministère normal de l’église locale, qui a touché le cœur d’Eugène et a entraîné sa réponse.

Maintenant, tu me demanderas peut-être pourquoi, voulant être missionnaire, je ne me joins pas à vous avec la petite bande que je pourrais réunir. Si je voulais répondre en gascon, je te dirais d’abord que c’est parce que tu t’es très faiblement soucié de m’avoir; mais ce n’est pas là la vraie raison, puisque je pense réellement ce que je t’ai mandé dans ma dernière lettre, que je ne suis pas à même de t’être fort utile.
Mais ce qui doit nous retenir, c’est que nos contrées sont dépourvues de tout secours, que les peuples laissent quelque espoir de conversion, qu’il ne faut donc pas les abandonner. Or ce serait les abandonner que de nous joindre à vous, parce que nous seuls, et non pas vous, pouvons leur être utiles. Il faut parler leur [propre] langage pour être entendu d’eux; il faut prêcher en provençal. Si nous pouvons nous former, rien ne nous empêchera de nous affilier à vous, si cette union doit être pour le bien.

Il conclut sa lettre en montrant qu’il est dans un processus de discernement, et dans sa fatigue, après sa maladie, il a toujours le désir secret de se retirer dans la vie contemplative d’un monastère.

Que Dieu soit glorifié, que les âmes se sauvent; tout est là, je n’y vois pas plus loin. Malgré cela, un secret désir me porterait ailleurs.

Lettre à Forbin-Janson, le 28 octobre 1814, E.O. VI n 2

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1 réponse à CE SERAIT LES ABANDONNER QUE DE NOUS JOINDRE À VOUS, PARCE QUE NOUS SEULS, ET NON PAS VOUS, POUVONS LEUR ÊTRE UTILES

  1. Denyse Mostert dit :

    «Si je voulais répondre en gascon, je te dirais d’abord que c’est parce que tu t’es très faiblement soucié de m’avoir. »

    Et voilà ! Forbin-Janson est maintenant au courant de la décision de son ami. Qui lui a été signifiée en des termes qui me font un peu sourire… Parce qu’ils me disent bien le caractère sans détours d’Eugène de Mazenod.

    Curiosité féminine ou désir de bien comprendre la pensée d’Eugène ? En fait, un peu des deux m’invite à une recherche. J’apprends que cette expression est issue du XVIème siècle alors que les habitants de la Gascogne, reconnus depuis longtemps comme d’excellents soldats, ne se privent pas de vanter et même d’exagérer leurs propres mérites.

    Hâbleur, vantard ? Des qualificatifs qu’on ne peut certes appliquer à Eugène de Mazenod puisqu’il précise que : « ce n’est pas là la vraie raison, puisque je pense réellement ce que je t’ai mandé dans ma dernière lettre, que je ne suis pas à même de t’être fort utile ».

    La « vraie raison » de son refus, c’est ce souci des plus pauvres, abandonnés à eux-mêmes, qui continue à le hanter. C’est à eux qu’il faut apprendre Jésus Christ, et cela dans « leur langage pour être entendu d’eux ».

    Et toujours cette adhésion à la volonté de Dieu ! « Que Dieu soit glorifié, que les âmes se sauvent; tout est là, je n’y vois pas plus loin »… Et encore un appel qui continue à l’habiter ! « Malgré cela, un secret désir me porterait ailleurs »…

    Comme il en a été pour Eugène, rien ne va de soi pour personne lorsqu’il s’agit de discerner sa véritable vocation. Oui, le Seigneur nous parle par les événements de notre vie. Mais toujours la décision finale nous appartient. Et beaucoup de foi, de patience et de générosité sont la plupart du temps bien nécessaires pour la prendre

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