Le Seigneur ouvrit la porte des missions Oblates pour les îles britanniques en envoyant William Daly rejoindre les Oblats comme étudiant pendant quatre ans. Eugène reconnut la signification missionnaire de ce geste et il se mit en action en 1841.
On sait que nous avons dans la congrégation un excellent père Irlandais de nation qui était arrivé à nous comme tombant du ciel. Ce sujet a parfaitement réussi. Il a constamment été un modèle de vertu et de régularité parmi nous. Parmi ses bonnes qualités, nous admirons surtout sa modestie et sa douceur.
Qui aurait dit que ce bon et cher enfant nourrissait dans son âme le feu de la plus ardente charité et un zèle à toute épreuve pour la conversion de ses compatriotes les anglais hérétiques répandus en Angleterre ou partout ailleurs? À peine devenu diacre, il s’occupa de préparer les voies à quelque établissement qui puisse fournir à la congrégation le moyen de concourir à la grande œuvre. Il me proposa d’écrire en Irlande pour en appeler des sujets propres à notre ministère. Il en reçut des réponses qui entretiennent son espoir de réussir dans cette entreprise
Journal d’Eugène de Mazenod, les 15 et 16 juillet 1841, EO XX
Rappelons-nous de Paul et Barnabé : “À leur arrivée, ils réunirent l’Église et racontèrent tout ce que Dieu avait fait avec eux ; ils exposèrent, en particulier, comment il avait ouvert aux non-Juifs la porte de la foi.” (Actes des Apôtres 14:27)
NOTE: À propos d’Eugène sur l’usage du mot ‘hérétique’.
La définition au dictionnaire est celle d’une personne qui n’accepte pas entièrement les préceptes de la foi établis par la religion catholique. Nous reviendrons plus clairement là-dessus lors de prochains articles où Eugène était peiné de voir le Peuple britannique forcé par le Roi Henry VIII de changer d’allégeance à cause de sa propre situation maritale. Dans ces années-là, la conception de l’église catholique était que ces gens vivaient dans l’erreur même si cela n’était pas de leur faute. Eugène les voyait comme étant ‘abandonnés’ et il voulait qu’ils reviennent à la plénitude du Salut.
Mgr Bourget, né en 1799, à Lévis en face de Québec est devenu évêque de Montréal en 1840. Nous voyons déjà qu’il est un ecclésiastique de la même époque que St-Eugène. Cette époque en est une de grands changements autant en France, comme nous le savons, qu’en Amérique. Sur le continent américain, Washington, président des nouveaux États-Unis meurt l’année de la naissance de Mgr Bourget et les Anglais perdent définitivement le combat contre les insurgés. Les alliés français sont venus à leur rescousse et on se souviendra longtemps d’un certain Lafayette et de Benjamin Franklin. Mais au même moment, les Anglais prennent Québec (1759) et la France cède toute l’Amérique française par le Traité de Paris en 1763) C’est la période où les Acadiens sont déportés. Le Québec maintient sa résistance à l’occupation en se battant pour sa langue, pour sa religion et en augmentant les naissances pour contrebalancer l’arrivée de l’immigration britannique (Cf. l’arrivée de 50 000 irlandais 1832 et l’épidémie de choléra en 1834).
Revenons à Bourget, Ignace de son prénom. Onzième de treize enfants et fils de cultivateur, il avait une santé fragile. Il eut un frère prêtre avant lui et cela nous indique qu’il était d’une famille particulièrement pieuse (Wikipédia). Il entra au séminaire en 1811, est admis dans la congrégation de la Vierge Marie et entre dans les ordres en 1818. Que de ressemblance avec Eugène qui fut prêtre en France en 1811! Bourget enseigne au séminaire et devient le secrétaire de Mgr Lartigue. Il est ordonné prêtre en 1822. Bourget est donc un administrateur attaché à l’évêché et il le restera jusqu’à ce qu’il devienne évêque en 1837. C’est la période du mouvement des Patriotes qui promeut l’indépendance du Bas-Canada. Il s’implique auprès des insurgés et de leurs familles. Il visite les prisonniers et assiste les condamnés à mort. Nous voilà dans le même genre d’implication que l’on retrouve chez Eugène de Mazenod en France lors de la création à Aix de ses Missionnaires de Provence. Être au service du peuple, pour le peuple en répondant à leurs besoins.
La suite…
Bourget, le thaumaturge et l’évêque actif, afin de ‘stimuler la foi et la pratique religieuse des fidèles’.
Un aparté :
Eugène, pauvre Eugène, y va d’un magnifique ‘hérétique’ pour notre bon Irlandais, et nous aurons droit aux ‘Sauvages’ au Canada…
Alors, excuse-toi donc Eugène, d’être de ton siècle. Nous avons, depuis, changé le lexique et le vocabulaire dans notre parler de gens instruits…
Molière, Oh Molière, que disais-tu sur la prose et sur les vers ?
Lorsqu’il remplace Mgr Lartigue, décédé en 1840 à Montréal, Mgr Bourget doit voir aux besoins des catholiques sur un immense territoire qui va jusqu’au grand-nord, au sud jusqu’aux États-Unis, à l’Est jusqu’à Québec et à l’ouest jusqu’en Ontario et plus. Il commence à revoir tous les besoins en visitant son immense diocèse : il visite toutes ses paroisses et voit à l’élaboration de nouvelles missions. Cela conduira vers la fin des années 1840 à la naissance du diocèse d’Ottawa (byTown). Il constate surtout le manque de prêtres, leur manque de formation et il donne aux sulpiciens le petit séminaire et il donne à quelques religieuses le soin de fonder la congrégation des filles de la charité. Se rendant à Rome en 1841, il visite Eugène-de-Mazenod à Marseille et il fait part au fondateur de ses besoins criants en prêtres pour l’aider dans la gestion de certaines paroisses, dans la formation des prêtres et dans l’établissement de nouvelles paroisses, de missions et de prédications. Il voulait aussi, de cette manière, freiner le protestantisme. Il réussit à obtenir l’arrivée de trois sulpiciens à l’été 41 et le 2 décembre de cette année, il reçoit quatre pères et deux frères Oblats. En 1842, c’est le tour de 9 jésuites et l’arrivée de nombreuses religieuses (sœurs de la Providence, sœurs de Ste-Anne).
Revenons sur nos Pères Oblats envoyés par Eugène: d’abord, Jean-Baptiste Honorat que nous connaissons tous et qui accompagna Eugène en France pendant plus de 20 ans. Avec lui le père Telmon, le père Baudrand et le père Lagier ainsi que les frères Fastray et Roux. L’évêque Bourget ne perd pas de temps et dès le 4 décembre, le père Honorat est dans sa cure au Mont-Saint-Hilaire. Il sera ensuite envoyé en mission (Outaouais, Saguenay, Rivière Rouge-Saint-Boniface). Eugène envoie deux ans plus tard le père Guigues au Canada. De paroisses en paroisses, de missions en missions, les pères et frères Oblats traversent tous les territoires du Québec, de l’Ontario et de l’Ouest canadien. Procureur général des missions à la demande de son ami Mgr Provencher, Bourget a pris à cœur la survie des missions dans l’Ouest avec les futurs évêques Taché et Laflèche.
Pour finir, avec des mots tirés de RCC no 9 juin 1985 (CRC) ’lors du centenaire, nous voudrions… retracer à grands traits le combat de ce saint évêque en qui les Canadiens …reconnaîtront un jour le plus grand peut-être d’entre eux.’
‘le meilleur moyen pour un peuple de conserver sa foi est de la propager au loin’ Mgr Bourget.
‘L’âme de l’épiscopat canadien’ Eugène de Mazenod.
L’homme de Dieu et le thaumaturge:
‘Lorsque le typhus se répand à Montréal, non seulement l’évêque visite les malades mais il s’offre en victime d’expiation. Il est atteint. Aussitôt l’épidémie est enrayée. Il fait alors le vœu de restaurer le pèlerinage à Notre-Dame de Bonsecours qu’avait fondé sainte Marguerite Bourgeoys. Il est aussitôt guéri !’ RCC no 9 juin 1985 (CRC)
De son vivant, on le reconnut comme thaumaturge :
• ‘Une sœur de la Miséricorde rapporte qu’un jour, une pauvre femme, venue de la campagne avec son enfant aveugle, demande à voir l’évêque. Celui-ci prie sur l’enfant, le bénit, puis demande aux religieuses de donner de la nourriture à lui et à sa maman. La religieuse ajoute: « Monseigneur était si coutumier de faveurs extraordinaires que l’on ne fut pas surpris de constater la guérison du petit, au moment où il se rendait au réfectoire. » ’ Tradition-Québec.ca
• Une femme devait être opérée pour un cancer du sein. En réponse à sa demande à l’aide, Monseigneur lui dit: « Demandez au docteur de remettre l’opération pour quelques jours, et nous ferons une neuvaine ensemble. » À la fin de la neuvaine, il n’y avait plus de cancer. ’ Tradition-Québec.ca